Causette et Légothèque dans Bibliothèque(s)

A l’occasion du congrès de l’ABF à Lyon, en mai dernier, l’ABF et Causette avaient fait un partenariat qui consistait en une distribution du magazine dans tous les sacs des congressistes, le logo de l’ABF sur le site de Causette et inversement. Pour poursuivre ces premiers échanges, la commission Légothèque a interviewé Bérangère Portalier de Causette pour la revue bibliothèque(s). Pour ceux et celles qui n’auraient pas lu l’article dans le numéro de cet été, en voici les propos.

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Légothèque : Savez-vous si Causette est achetée par beaucoup de bibliothèques ? Avez-vous quelques retours sur l’accueil et la réception de votre magazine par les bibliothécaires ?

Causette : Plusieurs centaines de bibliothèques sont abonnées à Causette, et nous recevons beaucoup de retours de lecteurs qui ont découvert notre magazine dans la bibliothèque ou la médiathèque de leur quartier. Notre lectorat manifeste généralement un goût prononcé pour la lecture, l’écrit, la réflexion, c’est pourquoi les « professionnels », qu’ils soient bibliothécaires, enseignants de français, formateurs apprécient particulièrement le magazine.

 Avez-vous une idée et un avis sur le lieu de rangement et d’exposition de Causette dans les bibliothèques ? Doit-ce être parmi les journaux et les périodiques ou avec les magazines féminins ?

Causette est un magazine féminin, qui n’a donc aucune raison de se trouver ailleurs qu’au milieu de Elle, Biba ou Marie-Claire. C’est d’ailleurs là qu’il prend toute sa saveur !

Vous considérez-vous comme magazine féminin (ou féministe ?) alors même que vous repoussez les codes de ces magazines ?

Nous sommes porteurs de valeurs qui sont féministes, bien sûr, mais aussi humanistes, écologistes, et nous promouvons un journalisme indépendant et de qualité. Ce positionnement nous a permis de devenir le premier magazine féminin à être reconnu IPG (Information Politique et Générale). Nous refusons d’enfermer les femmes dans des cases girly, avec des sujets uniquement tournés vers la séduction, la famille, ou le people. En revanche, nous estimons qu’à cette heure-ci, l’expérience d’être une femme reste très différente de celle d’être un homme et que cela justifie totalement de s’adresser aux uns en particulier. La subtilité tient dans le fait de s’adresser à chacun sans l’enfermer dans un rôle ou à une place réductrice.

Finalement, quel est votre lectorat ? Doit-on conseiller la lecture de Causette plutôt aux femmes, aux hommes ? Aux jeunes ? Aux moins jeunes ?

Notre lectorat est principalement féminin. Néanmoins, nous sommes lus par un pourcentage intéressant d’hommes. Ils viennent lire Causette car les sujets les intéressent aussi, et non pas dans le secret espoir de percer le mystère de la psyché féminine, comme cela arrive avec les autres magazines féminins.

Quant à la moyenne d’âge, nous sommes extrêmement fiers de constater que les lycéennes nous lisent avec un égal plaisir que les femmes actives ou les retraitées. C’est peut-être notre plus grande réussite. Nos abonnées ont entre 14 et 95 ans, avec une moyenne d’âge de 37 ans.

Vous adoptez un positionnement engagé : en quoi cela consiste-t-il ?

Causette est engagée dans les réflexions et luttes féministes, mais ne se définit pas comme une militante. Tout simplement parce que nous sommes journalistes avant tout. Nous ne serons jamais les porte-paroles d’une association ou d’un dogme.  Nous choisissons d’avoir un point de vue très tranché sur certains sujets (dernièrement, le mariage pour tous par exemple, thème qui ne souffre pas d’atermoiement, selon nous). Sur d’autres, les positionnements binaires, avec les méchants d’un côté, et les gentils de l’autre (comme à propos des FEMEN par exemple.) ne nous paraissent pas pertinents, et nous préférons apporter matière à réflexion pour que nos lectrices se fassent leur propre point de vue.

 Avez-vous déjà décerné une quiche à un établissement culturel, et a fortiori une bibliothèque ?

Oui nous avions épinglé la médiathèque d’Oloron Sainte-Marie, mais pas pour ses pratiques culturelles. Il se trouve que l’architecte qui l’avait dessinée a reçu l’Equerre d’argent, un prix d’architecture, alors que l’établissement n’est pas équipé pour permettre aux handicapés d’y pénétrer. Ce qui est dommage, vu l’investissement, et vu que tous les établissements publics doivent se rendre accessibles d’ici 2015.

Partant, considérez-vous que la forme journalistique participe de la formation de l’individu comme les bibliothèques le font par la médiation opérée au niveau des services, espaces, collections et animations qui peuvent participer de la construction de l’individu et amener le public à découvrir et s’ouvrir au monde qui l’entoure sous toutes ses formes ?

La lecture d’un journal, comme toute expérience culturelle, donne à voir un reflet, certes imparfait, du monde. Les journaux qui font perdurer des pratiques machistes (telles que parler uniquement de mode et de people aux femmes, ne jamais interroger d’expertes sur des sujets sérieux mais uniquement des hommes) se cachent derrière un argument qu’ils croient imparable : « c’est ce que veulent nos lecteurs ». Le succès de Causette invalide complètement cette thèse. Les gens ont soif d’apprendre, soif qu’on leur parle avec le respect qui leur est dû, qu’on les aide à tendre vers la culture, la réflexion, qu’on leur décloisonne l’horizon.

Je trouve extrêmement rassurant de voir que des bibliothèques prennent aussi leurs responsabilités et réfléchissent sur le sens de leur travail. Bien évidemment qu’une bibliothèque, par ses choix éditoriaux, et la mise en scène des livres qu’elle propose, propage une idéologie. Il faut en avoir conscience et contrôler ce message pour s’assurer qu’il est bien humaniste.

 Avez-vous déjà dans Causette mis en lumière certaines actions sur le sexisme menées par des bibliothèques ? Trouvez-vous que ces actions sont connues ?

Pas à ma connaissance. J’ai l’impression que les actions des bibliothèques sortent peu des bibliothèques.

Justement, êtes-vous déjà intervenu dans des actions culturelles mises en place par ou aux côté de bibliothèques ? Seriez-vous prêtes à participer le cas échéant ?

Nous allons soutenir une exposition sur le genre mise en place par la Légothèque et qui pourra être apportée à toute bibliothèque qui le souhaitera. Les bibliothèques, c’est un peu le biotope naturel de Causette. Un univers de réflexion, de rencontres, de partage accessible à tous !

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Voilà donc cette interview qui comme vous avez pu le lire dans la dernière réponse augure de nouveaux projets communs. à suivre, donc…


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Commentaires

Une réponse à “Causette et Légothèque dans Bibliothèque(s)”

  1. […] Interview du magazine Causette sur le blog Légothèque de l’ABF. […]

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