La culture Drag

Ce billet s’appuie sur le travail effectué par Julie Granier, bibliothécaire, et s’intéresse à la représentation de la culture Drag dans la littérature. Afin d’orienter et d’encadrer ses recherches, elle s’est concentrée sur la production éditoriale de 2018 à aujourd’hui, en France. Son constat est que les figures LGBTQIA+ sont de plus en plus représentées dans la production éditoriale francophone, qu’il s’agisse de littérature, de documents cinématographiques ou de jeux vidéo.

  • Drag Queen : de qui parle-t-on?

Le terme “Drag Queen” existe depuis le XVIIIème siècle et fait référence aux hommes qui se travestissent et laissent traîner (“to drag”) leurs jupes derrière eux. Néanmoins, cette étymologie est remise en question par une référence plus récente datant du XXème siècle où les femmes, ne pouvant pas jouer au théâtre, étaient incarnées par des hommes “dressed like a girl (drag)”.

La culture drag telle que nous la connaissons aujourd’hui prend son essor dans les années 1990, aux Etats-Unis, en Angleterre mais aussi en France, à Paris, particulièrement dans le quartier de Pigalle, dans le monde de la nuit.

Une Drag Queen est une personne, homme ou femme, qui se construit une identité féminine volontairement basée sur les stéréotypes du genre. La personne se crée alors un nom et utilise son personnage principalement dans un objectif de spectacle incluant du chant, de la danse, du stand-up…

Cet art militant, qui prône l’acceptation de soi et la différence, s’est peu à peu ringardisé durant les années 2000 jusqu’à l’émission “Ru-Paul’s Drag Race” lancée par la célèbre Drag Queen Ru-Paul aux Etats-Unis et qui participe grandement à intégrer la culture Drag à la culture populaire américaine.

Il est important de préciser que s’habiller en Drag Queen est un travestissement qui n’est pas systématiquement en lien avec l’orientation sexuelle de la personne ni avec son identité de genre. Être Drag Queen ne ne signifie pas forcément être transgenre.

 

  • Qu’en est-il aujourd’hui dans la littérature populaire et dans nos bibliothèques ? Voici quelques références bibliographiques pour illustrer ce billet.

Julian, sirène parmi les sirènes

Récemment paru en français aux éditions L’école des loisirs, “Julian est une sirène” de Jessica Love est la référence Drag Queen dans la littérature enfantine.

Il s’agit du premier album écrit et illustré par Jessica Love, actrice de théâtre américaine. Paru en version originale aux éditions Candlewick en 2018, il a déjà remporté trois prix jeunesse : le Stonewall Book Award (prix américain qui récompense des ouvrages à thème LGBT), le prix Klaus Flugge (prix de littérature jeunesse anglais) et le prix de la Foire de Bologne (prix de littérature jeunesse italien).

Outre la beauté de ses illustrations, le texte minimaliste nous offre un album frais et coloré qui aborde avec douceur la question du genre et des identités. Quel bonheur de voir cette grand-mère qui accompagne avec respect et tendresse son petit fils sur son propre chemin ! Quel plaisir de voir ce petit Julian si fier, sirène parmi les sirènes à la “Mermaid Parade” de Coney Island !

Des monstres jolis

Du côté de la littérature adulte, une publication se démarque et aborde avec justesse le parcours de deux Drag Queens des années 80 jusqu’aux années 2000 aux Etats-Unis. Il s’agit de “Jolis jolis monstres”, roman écrit par Julien Dufresne-Lamy et paru en France aux éditions Belfond en août 2019. Auteur français prolifique avec déjà plus de dix romans parus depuis 2012, Julien Dufresne-Lamy s’intéresse à des sujets variés, de l’histoire de Benjamin Berlin, héros jeunesse et télépathe, à la chorégraphe allemande Pina Bausch avec “Deux cigarettes dans le noir”.

Il nous propose une rencontre avec la culture Drag entre fiction et réalité dans “Jolis jolis monstres”. On y suit le parcours de James alias Lady Prudence qui, après une carrière exemplaire, quitte la scène pour y revenir quelques années plus tard en tant que “Queen mother” pour Victor, jeune père de famille qui rejoindra la “Ru-Paul’s Drag Race” sous le nom de scène Mia de Guadalajara.

La vie de ces deux personnages fictifs croise celles de Drag Queens célèbres, ayant réellement existé ou existant, telles que Ru-Paul, Angie Xtravaganza ou Angel Melendez. Un exercice de style réussi qui permet de découvrir la culture drag, ses codes et ses motivations, mais aussi le côté sombre des années sida et de la violence homophobe, transphobe et raciste.

 

  • Si les Drag-Queens vous étaient contées…

Dans les bibliothèques, depuis quelques années, la culture Drag n’est plus seulement présente uniquement dans les livres.

Initiées en 2015 dans les bibliothèques de San Francisco par l’association “Drag Queen Story Hour”, littéralement “l’heure du conte Drag Queen”, ces heures du conte animées par des Drag-Queens ont été proposées aux enfants de 3 à 11 ans dans le but de donner envie de lire tout en prônant la diversité, l’amour de soi et le respect de l’autre.

Un modèle qui s’est ensuite multiplié dans différentes bibliothèques américaines puis outre-Atlantique. En France, la première heure du conte Drag-Queen a été organisée au sein de la bibliothèque Louise Michel (Ville de Paris) en 2018 à l’occasion de la “Queer Week”.

Pour en savoir plus, voici le lien vers l’article publié sur le blog Légothèque à propos de l’heure du conte proposée par les Drag-Queens à la Bibliothèque Louise-Michel (Ville de Paris) en mai 2019. La bibliothèque a subi cette année là une campagne de harcèlement transphobe et homophobe alors qu’elle programmait des histoires contées par des Drag Queens, dans le cadre de la Queer Week.

Sources :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Drag_queen

https://en.wikipedia.org/wiki/Drag_Queen_Story_Hour


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Commentaires

3 réponses à “La culture Drag”

  1. Avatar de Laura Blasutto (@jaimesbonde007)

    Merci pour cet article ! Je tiens quand même à signaler qu’il n’y a pas que des Drag Queen, il y a aussi des… Drag King ! Toute aussi ancienne (XVIIIe siècle également), toute aussi vivace, il est dommage de ne pas parler de cette culture http://www.barbieturix.com/2013/11/07/10-drag-kings-que-vous-devriez-connaitre/

    1. Avatar de fabbib
      fabbib

      Oui, vous avez raison, mais notre article ne prétend pas couvrir toute l’étendue de ces sujets.

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