Les 30 féministes que personne n’a vus venir ; nous sommes tous des féministes

Bibliothécaires, voulez-vous doper vos stats de prêt avec un livre en bichromie taupe/orange fluo préfacé par Beth Ditto (Beth Ditto –> le groupe Gossip) ? Chiche ! Vous nous en direz des nouvelles.

La promesse : un ouvrage de moins de cent pages à la mise en pages soignée (Enora Denis). Trente portraits numérotés et présentés en doubles-pages.

Le verdict : l’accueil est généreux, les portraits décalés, souvent drôles, toujours pertinents. Ce palmarès parlera donc autant aux connaisseurs.euses de la cause qu’aux néophytes, et on gagnera surtout à en rire d’abord et en discuter ensuite.

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L’enjeu de faire connaître des personnalités emblématiques est donné dès l’ouverture de l’ouvrage avec la préface de Beth Ditto : « Enfant, j’ai trouvé des exemples de force féminine dans des êtres plutôt improbables : Piggy, Cindy Lauper (…).  [Elles] ne correspondent peut-être pas à à l’idée qu’on se fait des féministes, mais moi, enfant qui les voyait à la télévision, le message que j’en recevais était absolument féministe. » On est là tout à fait synchrones avec la démarche de (l’ABF avec) Légothèque : promouvoir la construction de soi, tirer profit des études de réception.

Dans Les 30 féministes que personne n’a vus venir, on ne trouve en effet pas les « grandes » féministes d’hier et d’aujourd’hui, mais plutôt des personnalités féministes malgré elles (ou eux) : « il ne s’agit pas de délivrer des brevets de féminisme, mais simplement d’évoquer des gens, des personnages, des histoires. »

Les trente portraits sont signés Johanna Luyssen (par ailleurs journaliste à Libération). Seule la lecture complète des trente portraits rend honnêtement compte de son travail fin et de son écriture documentée. Citons néanmoins les titres de quelques uns, de manière aléatoire : N°3 : Yoko Ono, présumée coupable ; N°5 : Charlie Hebdo, le malentendu ; N°8 : Jane Austen, ironie et préjugés ; N°11 : Ali Al-Muqri, le fruit défendu ; N°14 : Les plissés d’Issey Miyaké, le corps libéré ; N°20 : Lucien Neuwirth, « Lulu la pilule » ; N°25 : Kurt Cobain, un jeune féministe en colère ; N°29 : La Mère Denis, la philosophie dans le lavoir…

N’en disons pas davantage sur le contenu, ce serait gâcher l’effet des surprises qu’il contient.

Palmarès est une collection des éditions Contrepoint, aux titres on ne peut plus originaux.

Sandra Lorenzo, dans le Huffington Post remet la parution de cet ouvrage dans son contexte, à savoir l’essor du pop-féminisme ou néo-féminisme, et du Girl power depuis les années 2010.

Pour parfaire le tout, vous trouverez une Girl power playlist compilée par l’auteure en bonus (avec le QR code en 4e de couv.). Elle a pensé à tout.

Vous l’aurez compris, ce livre est une porte d’entrée parmi d’autres et ne prétend pas à couvrir toutes les problématiques et enjeux du féminisme. Deux autres ouvrages tout aussi accessibles et intéressants peuvent l’accompagner sur vos étagères, et constituer des portes d’entrées plus charpentées :

  • Histoire du féminisme / Michèle Riot-Sarcey, La Découverte, 2008, (coll. Repères)
  • Féminismes pluriels / Nicole Van Enis, éd. Aden, 2012

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Chimamanda Ngozi Adichie nous ouvre une troisième porte d’entrée dans les questions de genre et le féminisme. Un de ses discours a trouvé un tel écho qu’il est non seulement toujours accessible en vidéo sous titrée mais traduit et transcrit dans un petit livre à prix d’ami chez Folio (2 € l’ouvrage inédit). En 35 pages alertes, Chimamanda Ngozi Adichie fait le parallèle entre sa découverte du féminisme et ses révoltes contre le machisme et la réduction des femmes au silence. Découverte du mot féminisme, à 14 ans, lorsqu’un ami lui dit, réprobateur : « Tu es une féministe, tu sais. ».

Si le terme intersectionnalité ne vous dit rien, pas de panique (et tout n’est pas perdu, il y a un panneau sur le sujet dans l’expo légothèque), C. Ngozi Adichie l’illustre tout au long de son discours. Comment être femme ? Comment être Noire ? Comment être une femme noire ? Depuis l’enfance, l’adolescence, sa vie de jeune femme, l’obligation de ne pas intimider les hommes va croissante. Dans le même temps, le souci de plaire à autrui, excluant la colère et l’agressivité, est inculqué aux filles. Très vite dans sa démonstration, le point crucial est mis à jour, la virilité : « notre façon d’éduquer les garçons les dessert énormément. » Il est en effet régulièrement question d’éducation, ce qui, à défaut d’être très développé dans ce court texte, teinte d’optimisme le discours, par ailleurs implacable.

Le point de vue de l’auteure est nigérian, et toutes les anecdotes citées en exemple racontent le Nigeria mais elle insiste :  « partout dans le monde, la question du genre est cruciale », et ce discours trouve en effet un écho tout à fait audible au-delà du Nigeria et du continent africain. Parmi bien d’autres, ce constat est le même au Nigeria ou en France : « Une conversation sur le genre n’est jamais facile. Cela gêne ou même agace les gens. »

Mais peut-être avez-vous déjà un extrait de ce discours dans votre médiathèque… Il a été samplé dans la chanson Flowless de Beyoncé (avec les sous titre) !

Chimamanda Ngozi Adichie, Nous sommes tous des féministes, Gallimard, 2015 (Folio ; 5935)


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Commentaires

Une réponse à “Les 30 féministes que personne n’a vus venir ; nous sommes tous des féministes”

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